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Libération

Le capital en piédestal

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publié le 9 novembre 2002 à 1h43

Emile Zola a-t-il cette photo sous les yeux quand il entreprend sa saga des Rougon-Macquart, arborescence où l'argent circule dans toutes les branches du romanesque ? Une exposition en cours à la Bibliothèque nationale de France (lire Libération du 5 novembre) tend à le prouver puisque cette image extraite de la collection d'Henri Mitterand, auteur de Passion Emile Zola (éd. Textuel), représente les deux frères, Emile et Isaac Pereire, banquiers qui incarnèrent l'affairisme financier du Second Empire. Outre la construction des premières lignes de chemins de fer, ils créent en 1852 le Crédit mobilier, une idée qui aura de l'avenir puisque cette banque est destinée à prêter à long terme aux industriels. A la marge des Pereire qui sombrèrent en 1869 dans la faillite du Crédit mobilier aussi retentissante que leur renommée, surgit donc dans la Curée le personnage du banquier Aristide Saccard, qui, comme eux, cumule toutes les «qualités» : spéculateur, politicien, flambeur (les Pereire, tous deux députés sous le Second Empire, participèrent activement à l'haussmannisation de Paris et à l'invention de la ville d'Arcachon). Mais leur portrait pourrait aussi servir d'épigraphe à un autre ouvrage-clef de l'époque. On a retrouvé une photo du Capital (tome I publié en 1867), la voici. Pas sûr cependant que Marx aurait apprécié le cliché : chapeaux très haut de forme (métaphores de cheminée d'usine ?), chaînes de montre qui s'affichent sur la rondeur des gilets, cigare pour l'un d'eux,