En matière de marines photographiques, c'est fatalement la figure tutélaire d'Anita Conti qui domine. Jean-Michel Sicot, qui signe cette image parue dans Libération le 28 novembre, rend hommage à cette belle référence qui est aussi un art de vivre. Sa photographie nous dit que sur un bateau de pêche où tout étranger est un corps embarrassant, il a su trouver son cadre, c'est-à-dire sa place. Mais à cause de la lumière qu'on dirait électrique, en raison du fond qui pourrait être de toile peinte, ou du taux d'humidité luisante qui pourrait être le fait d'un accessoiriste aspergeant le ciré du marin, c'est pas mal de cinéma qui nous saute au visage. Pour tout dire, Moby Dick (1956), film d'aventures de John Huston avec Gregory Peck dans le rôle du capitaine Achab, traqueur de baleine. Du noir et blanc en couleurs. De fait, pour ce film, Huston trafiqua le Technicolor pour obtenir un sépia dominant proche des gravures du XIXe siècle.
Mais le matelot Fred, ici à la manoeuvre sur le pont du chalutier Saint-Josse IV, n'ayant pas le physique de Gregory Peck mais plutôt celui d'un Anthony Quinn, ce hiatus contrariant excite une confrérie d'un autre genre, littéraire. Herman Melville évidemment, le Joseph Conrad de Lord Jim, mais aussi, nous souffle-t-on amicalement, Edouard Peisson (1896-1963), ex-officier de marine passé à la littérature : trente-cinq volumes en trente ans, aux titres voyageurs : Chalutier 304, le Sel de la Mer, Passage de la ligne, le Quart de nuit. Et cette phrase,