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Interview

Michael Stora, psychanalyste:«La mise en scène de ses fantasmes»

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publié le 14 décembre 2002 à 2h08

Michael Stora a 38 ans. Psychanalyste et praticien dans un centre médico-psychologique de la région parisienne, il est adepte du jeu vidéo. Depuis qu'il exerce, il utilise le jeu dans sa relation avec ses patients. En 2000, il a fondé l'Observatoire des mondes numériques en sciences humaines.

Jouez-vous aux Sims ?

J'ai peu joué, mais cela me passionne à travers les conversations sur le sujet. Je connais beaucoup de gens, parmi lesquels une majorité de femmes, qui m'ont parlé des Sims avec enthousiasme ou angoisse. Par exemple, une jeune femme avait une vision plutôt matérialiste des choses avec un fort désir de réussite et des valeurs très politiquement correctes. Elle a créé trois familles : la sienne et la copie de deux familles d'amis. Avec l'une de ces familles, elle avait quelques difficultés relationnelles dans la réalité. Comme par hasard, dans le jeu, elle a créé la maison de ces gens en oubliant d'en construire le toit. Le lendemain, toute la famille était morte et elle a interprété cet oubli comme l'évidence de sa propre agressivité à l'égard de ces amis.

A l'inverse, une autre femme m'avait dit qu'elle avait commencé à jouer quand elle est tombée enceinte. Elle craignait de ne pas être une bonne mère, cas typique d'angoisse. Or, son personnage, une femme qu'elle a fabriquée à son image, a eu son enfant «avant elle». Le fait de jouer, enceinte, à être une bonne mère l'a, selon elle, beaucoup rassurée. J'ignore ce qu'il se serait passé si, dans le jeu, cela s'était mal