«Aujourd'hui, je vais vous montrer un tableau sur lequel il n'y a quasiment rien à voir...» Rires. Samedi matin, musée national d'Art moderne du Centre Georges-Pompidou, une quinzaine de personnes sur deux bancs. Un distrait s'assied dos au tableau. Rires. Quelle importance de s'asseoir dos ou face à une oeuvre pour ce jeune aveugle ou malvoyant qui ne voit pas, ou si mal ? Si, ça fait. Le distrait se retourne et fait face à Ten Lizes, fameux tableau d'Andy Warhol. Le conférencier poursuit : «Vous visualisez bien les mesures, 2,01 mètres de haut sur 5,64 mètres de long.» Une femme lui demande de parcourir le tableau dans sa longueur à «pas sonores» afin de pouvoir se représenter sa taille. Derrière les bancs, les visiteurs du musée passent. Certains sans rien voir. D'autres s'arrêtent, s'étonnent de ces têtes baissées, de ce chien sage couché aux pieds de sa maîtresse. Une femme s'enfuit, comme prise de panique. Un couple, puis une dizaine de personnes s'attardent, profitent de la conférence. «La différence entre les visages, c'est les contrastes ? Au début, c'est plus noir et à la fin, c'est plus flou ?» demande une femme, non-voyante.
Le conférencier évoque l'alternance entre ombre et soleil qu'évoque le visage multiplié de Liz. Elle conclut : «Il y a l'usure du regard aussi. Plus ça se multiplie, plus il y a un affadissement. Il y a quelque chose qui se désincarne en fait...» Sydney, un habitué de ces conférences, poursuit la réflexion : «Est-ce qu'on ne peut pas considére