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Libération

Quand on met le doigt dans la morale

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publié le 19 avril 2003 à 22h54

A morale morale et demie. On a beaucoup parlé de la boîte de Pandore à propos des événements irakiens. Les Américains, en exportant la démocratie sans réfléchir, ne flanqueraient-ils pas le désordre dans la région au risque qu'on soit incapable de retrouver après la situation désastreuse précédente ? Mais ne sont-ce pas plutôt les Français qui ont ouvert la fameuse boîte en introduisant l'éthique là où on n'était pas habitué à lui voir sa place réservée ? C'est un engrenage, la morale. Déjà, les Américains nous prennent au mot en nous proposant d'annuler les dettes de l'Irak envers nous, voilà qui serait gentil et moral et efficace. On leur a tellement dit qu'on restait leurs amis même si on faisait tout pour les embêter qu'ils nous adorent pareillement, qui aime bien châtie bien. Ils sont prêts à faire exploser l'ONU rien que pour nous embêter, que notre droit de veto adoré tourne à l'emprunt russe. Serait-ce un crime contre la morale que boycotter les produits français ? C'est très bien d'avoir raison seul contre tous mais là on avait raison tous ensemble, en France, c'était quand même l'idéal. On le jouait un peu David contre Goliath, or Goliath a quand même gagné un paquet de fois avant de perdre. On s'est laissé griser, on a mal estimé le rapport de forces. Maintenant, on est d'accord pour renoncer à la morale mais c'est trop tard. Quand Jacques Chirac demande à George W. Bush d'être «pragmatique», il s'agit d'un sacré retournement de veste parce qu'il n'y a pas moins