C'était le scénario le plus logique et le plus frustrant : la Convention sur l'avenir de l'Europe a finalement accouché d'un projet de Constitution minimaliste. L'autorité et l'audace de Valéry Giscard d'Estaing avec renversement d'alliances éclairs et passage en force ont certes balayé les résistances de plusieurs Etats eurosceptiques. L'ancien président pourra présenter la semaine prochaine au Conseil européen de Thessalonique un texte unique, préservé des options qui auraient restitué aux Etats membres tout le pouvoir constituant et rendu inutiles les quinze mois de travaux de la Convention. Les eurosceptiques, gouvernement Aznar en tête, se trouvent privés de l'une de leurs armes.
Le prix à payer est malheureusement très lourd. Pour aboutir à un consensus contraint, il a fallu en rabattre et se contenter du plus petit dénominateur commun. Les apparences sont certes sauves : Giscard a toujours su habiller avec chic ses déconvenues internationales. Son projet de Constitution européenne ressemble donc au fameux baudrier de Porthos : rutilant par-devant et morne par-derrière. Dans le texte de la Convention, les symboles sont flatteurs, les procédures, terriblement restrictives. Ainsi pourra-t-on fêter la naissance d'un président du Conseil européen enfin stable, élu pour deux ans et demi renouvelables, donc avec une perspective de cinq ans : l'éternité après l'absurde toupie semestrielle. Hélas, pour convaincre les petits Etats, il a fallu en faire un simple chairman sans