A en croire le gouvernement, il est «inadmissible» de prendre les élèves en otages, et tout autant les usagers comme feraient les grévistes des transports. On veut rendre la vie impossible aux preneurs d'otages ou quoi ? Qui est-il aujourd'hui admissible de prendre en otage ? On a l'impression que si des malfaiteurs, dans une banque, s'emparaient arme en main de clients passant là au mauvais moment, ce serait moins scandaleux. On voit même pourquoi : les bandits, au moins, risquent la prison. Ce qui est insupportable dans les preneurs d'otages grévistes est leur impunité. Bien sûr, ils ne sont pas payés, leur action n'est donc pas gratuite. Mais la seule grève qui semblerait tolérable, a-t-on le sentiment, consisterait à ce que les grévistes travaillent sans être payés, ce qui assurerait le bien-être conjoint des usagers et du budget de l'Etat (ce serait l'instauration du service maximum, la grève deviendrait très populaire sans que les revendications soient forcément assouvies). On galvaude le mot otage, ce n'est plus notre vie mais notre confort qui est en danger. On pourrait relire toute l'actualité à la lumière de cette nouvelle grille. Les éboueurs prennent en otages nos ordures (ou nos trottoirs, ou nos nez). Jacques Chirac a pris en otages les électeurs antilepénistes au deuxième tour de la présidentielle. Nicolas Sarkozy a pris Luc Ferry en otage. Les casseurs prennent les manifestants en otages et Météo France les températures. La grève des transports dérange énormé
Trop d'otages tue l'otage
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par Mathieu Lindon
publié le 14 juin 2003 à 23h23
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