Menu
Libération

Les trois Raffarin

Article réservé aux abonnés
publié le 21 juin 2003 à 23h28

Depuis quelques semaines, on pouvait s'en douter ; depuis quelques jours, on peut le vérifier : un Jean-Pierre Raffarin peut en cacher un autre. A lui seul, le Premier ministre constitue une trilogie. Il y a le Jean-Pierre Raffarin qui s'est présenté, il y a le Jean-Pierre Raffarin qui a émergé, il y aura le Jean-Pierre Raffarin qui s'est projeté. Le premier arrivait du Poitou, l'oeil malin et le dos rond. Il avait finalement été choisi par Jacques Chirac pour tout ce qu'il n'était pas, comme l'antimodèle par excellence. Il n'avait pas fait l'ENA, contrairement à la plupart de ses prédécesseurs. Au contraire, grande originalité dans sa fonction, il venait du secteur privé. Ce n'était pas un Parisien mais un provincial professionnel, tant il jouait de sa différence régionale : il voulait être l'homme de Chasseneuil-du-Poitou, attaché à la glèbe et surtout pas aux parquets précieux du VIIe arrondissement. Il n'appartenait pas au RPR, c'était même un cas presque unique de syncrétisme giscardo-chiraquien. Il n'avait été ni infidèle, ni ingrat ou troublé durant la cohabitation. Cela en faisait un chef de gouvernement atypique, spontanément aimable, presque affable à la manière d'un Jacques Chaban-Delmas, de plain-pied avec les Français, cultivant son image de proximité avec une minutie de jardinier japonais, expert en parler simple. En somme, un président du conseil de la IVe République. C'était évidemment trop simple pour ne pas être un demi-masque. Durant son noviciat, il insta