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Libération
Interview

«On nous a écoutés pour la première fois»

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publié le 12 juillet 2003 à 23h51

Cesar Del Angel, dirigeant du Mouvement national des 400 villages de la province de Veracruz (Mexique).

«Nous avons demandé justice en mobilisant des milliers d'hommes pendant des années. Rien ne s'est passé. Nous avons rencontré le président de la République, Vicente Fox, et son épouse, Marta. Rien ne s'est passé. Cette année, nous avons campé 40 jours devant l'Assemblée nationale et toujours rien. Des camarades ont commencé une grève de la faim. Leur situation s'agravait et leurs épouses ont proposé de manifester nues. Les maris ont refusé et se sont déshabillés sans elles. Mais personne n'y a prêté attention. Finalement, les femmes se sont dénudées et les médias du monde entier ont accouru. Le gouvernement nous a reçus, nous a promis de l'aide. Pour la première fois, nous avons été écoutés. Nous, les paysans, nous sommes si marginalisés qu'il nous faut arriver à ces mesures extrêmes. Certains utilisent la violence. Nous préférons nous dénuder, c'est plus efficace. Même si c'est humiliant. Voir nos femmes âgées en photo dans les journaux fait de la peine. Mais je crois que les politiciens qui se foutent de nous sont encore plus humiliés lorsque les gens comprennent où nous en sommes. J'ai fait de la prison comme une centaine de mes compagnons. Nos terres ont été volées. Deux des nôtres ont été assassinés. Les coupables n'ont pas été jugés et sont toujours au pouvoir. Alors, se mettre nu en public devient aussi un acte de détermination qui nous donne plus de force pour pours