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20 000 lieux sous la terre

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Creusées dans la roche, les cités souterraines de Cappadoce servaient, au VIIIe siècle, à s'abriter des razzias ennemies. Plongée dans le dédale anatolien.
publié le 10 juillet 2004 à 1h24

Sivasa, envoyé spécial.

Entre les roches de l'éboulis affleurent des fragments de poteries, le reste du col d'une amphore ou un bout galbé de jarre en terre cuite portant encore des traces de peinture. La colline surgit au milieu de nulle part, près du hameau de Sivasa, dans l'immensité vide du plateau anatolien, à l'est de la Turquie. Le guide essaie de se repérer, hésite, puis trouve enfin, au fond d'une large crevasse, un trou aux bords réguliers. C'est un tunnel à peine assez large pour laisser passer un homme. Une odeur d'humidité prend la gorge. Au bout d'une cinquantaine de mètres surgit, dans le faisceau des lampes, un gros disque de pierre dure qui obstrue à demi le conduit. Roulant sur un rail de pierre, ce bloc d'une demi-tonne barre l'entrée d'une ville souterraine. En avançant surgit une grande salle creusée dans la roche d'où partent d'autres tunnels qui plongent encore plus profondément sous la montagne. «Certains sont des impasses, d'autres des pièges qui aboutissent sur un gouffre juste après un tournant à angles droits. Ce labyrinthe de galeries représentait un système de défense impénétrable entre chacun des niveaux», explique Mehmet Borahan Bilen, jeune guide passionné d'archéologie. Depuis 2000 ans, sous les Hittites puis les Grecs, les Romains, les Byzantins et enfin les Turcs, s'est développée dans cette Cappadoce au relief de tuf ­ cette pierre tendre d'origine volcanique sculptée par l'érosion et trouée comme un gruyère ­, une civilisation troglodyte.