Samedi.
Ce que je dois subir,
je m'en ferai le maître
Je ne reconnais rien, ni chevaux ni voitures,
Paris s'est transformé par cent mille aventures
Et tant de rues barrées, de tranchées, de déblais,
De travaux effrayants aux portes des palais
Donnent l'illusion d'un vivant cimetière.
Qui veut aller devant doit passer par-derrière.
Me faudrait-il tourner ma surprise en horreur
Et de ce monde ainsi me faire le censeur ?
Qu'importe le destin qu'il me faudra connaître,
Ce que je dois subir, je m'en ferai le maître
Car tragédien je fus et suis sûr de trouver
Dans cet univers neuf de quoi l'enjoliver.
Devrai-je chercher loin aujourd'hui les Camille,
Horace sacrifiant par vertu sa famille,
Un Auguste trahi, un Cid contemporain,
Un Cinna complotant la mort du souverain,
Un Tite énamouré, une femme infidèle
Et pour en terminer quelque prince modèle ?
Dimanche.
Des candidats furieux molestant l'amitié
M'étant mieux informé, j'apprends fort à propos
Que mon glorieux pays regorge de héros
Et que chacun prétend, postulant à l'Empire,
D'ici moins de deux ans, pour le mieux ou le pire,
Monter par son courage au sommet de l'Etat
Et devenir ainsi son premier potentat.
A mon âme avertie, la chose est familière
Car notre Rome antique en était coutumière,
Des candidats furieux, molestant l'amitié,
S'affrontaient tour à tour sans gloire et sans pitié.
A Rome ils étaient deux, ou parfois trois ou quatre,
En France d'aujourd'hui, décidés à se battre,
On les compte par vingt et dans tous les partis
Chacun se croit déjà parmi les mieu