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Interview

En colère contre Bush, Hollywood s'engage dans des films politiques

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Peter Biskind, critique, journaliste et auteur de nombreux livres sur le cinéma américain, explique pourquoi, aux Etats-Unis, le réveil militant passe par Hollywood, où les stars jouent le rôle tenu en Europe par les intellectuels.
publié le 11 février 2006 à 20h18

Le secret de Brokeback Mountain, l'histoire d'amour interdite entre deux cow-boys dans l'Amérique profonde des années 60, est en tête pour les oscars avec huit nominations. Dont meilleur film, meilleur metteur en scène pour Ang Lee... Une première. Un western gay ne choque plus personne ?

Pas si facile. Brokeback Mountain a été produit par Focus, la branche «art et essai» du studio Universal. Mais jamais, jamais, le studio Universal n'aurait lui-même produit ce film. Et on veut bien le sortir sous le sigle «Focus» mais pas sous le label «Universal». C'est encore un sujet trop sensible pour les studios, cela leur fait peur. Universal aurait craint un appel au boycott lancé par les lobbies des millions d'électeurs d'extrême droite, ce qui est arrivé à Disney en 1995 : Miramax, alors filiale de Disney, avait acheté Priest, un film anglais sur un prêtre homosexuel. Disney, le bon studio des familles, s'est retrouvé inondé de lettres de haine, menacé de boycott de ses dessins animés et ses parcs d'attraction. Les frères Weinstein, fondateurs de Miramax, qui avaient pour philosophie ­ et pratique ­ que toute publicité est utile, qu'elle soit bonne ou mauvaise, là, ont dû reculer. Pour Priest, et aussi pour un autre film sulfureux, Kids, qu'ils ont dû racheter à Disney et sortir sous une autre étiquette.

Quant aux gays, Universal avait déjà refusé en 1998 de distribuer Happiness, comédie anglaise produite par Good Machine (qui est devenue Focus) où un pédéraste était présenté d'une f