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Libération
Interview

La rue arabe n'existe pas, mais la rue de l'islam, la rue de Dieu, existe

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Mohamed Kacimi, né en Algérie, pose un regard sans illusions sur le monde arabe et l'islam. Sur ces sociétés «profondément communautaires, tribales» où «la notion d'individu n'existe pas». Où l'intellectuel est constamment écarté, tant la soumission au texte religieux et le mépris de l'esprit y sont grands.
publié le 7 octobre 2006 à 23h35

Caricaturons : quand on l'oublie, le monde arabo-musulman s'arrange pour faire parler de lui... Il suffit de citer les caricatures danoises, Benoît XVI, l'opéra Idoménée, Robert Redeker. Au fond, qu'a-t-il à reprocher à l'Occident ?

Ce contentieux entre l'Occident et l'islam va au-delà des conflits de la colonisation, des croisades... Même les croisades, dont on a pu penser qu'elles ont constitué une rencontre, demeurent de l'ordre de la confrontation stérile : «Au fond, tout ça ne nous a rapporté que la culture de l'abricot...» pour citer Jean-Pierre Le Goff. C'est une généalogie de malentendus comme s'il n'y avait jamais eu d'espace de rencontres entre deux cultures, il faut le dire, souvent antagoniques. Ainsi de l'islam considéré, aujourd'hui, comme une religion austère, dans la négation du plaisir, alors que, dès le XVIIIe siècle, de Pierre Bayle à Voltaire, il est perçu comme une religion paillarde, charnelle, et du plaisir... Aujourd'hui, on ne peut nier que le monde arabo-musulman soit un monde malade. Malade des échecs de la décolonisation, des expériences socialistes avortées, de l'avènement de l'économie de libre marché souvent sauvage, avec les dénationalisations et privatisations instaurées de l'Algérie au Yémen. Un monde qui, en trente, quarante ans, a essayé plusieurs portes de sortie et qui échoue devant chacune d'entre elles. Et quand tout échoue ici-bas, l'eschatologie devient pour beaucoup l'unique ressource. A cela s'ajoute, bien sûr, depuis