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Libération

Un dictateur à distance

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publié le 9 décembre 2006 à 0h25

Le 27 octobre 1975, pendant l'interminable agonie du dictateur Franco, Libération titrait avec esprit : «Alors, ça vient ?» A l'heure où pour Pinochet, l'agonie semble elle aussi stationnaire, c'est la même question qui nous taraude. Toutes choses étant égales par ailleurs, puisqu'à l'instar de son illustre prédécesseur, Pinochet va mourir dans son lit. Mais en attendant que ça vienne, cette photographie permet de patienter. Elle a été prise en septembre 1973 à Santiago du Chili, juste après le coup d'Etat qui a assassiné Allende, président élu, et promu Pinochet, général putschiste. Ce qui est intéressant, c'est que, dans la pénombre des verres fumés, on peut distinguer le coup d'oeil que Pinochet jette à la caméra. Bien qu'on suppose que cette caméra n'a pu approcher de si près le nouveau dictateur qu'avec toutes les permissions nécessaires, voire à des fins de propagande, il se trouve que l'oeil de Pinochet est sinon inquiet, du moins méfiant. Un dictateur qui se méfie de l'image, même officielle, même téléguidée, c'est forcément une bonne nouvelle pour l'image. Il faut dire qu'en l'espèce l'image le lui rend bien. C'est David Burnett qui, en 1973, réalise ce portrait. A l'époque, Burnett n'est pas encore une gloire du photoreportage, mais en avril 1971 pour le magazine Life il a déjà fait des photographies de GI dans le «merdier» vietnamien, qui ont secoué l'Amérique dans sa certitude d'avoir raison. Pourquoi cette photo est excellente ? Parce que Bu