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Libération

«Connaissez-vous cet Occident-là ?»

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par Brigitte Giraud
publié le 16 juin 2007 à 8h21

SAMEDI Une guêpe chez le coiffeur

Je ne vais jamais chez le coiffeur le samedi. Trop de monde, trop d'attente, trop de femmes au mètre carré. Mais ces derniers jours je me suis mal débrouillée, avec le temps, avec les horaires de train, avec le sommeil. Et tant qu'à tout faire à l'envers, autant enfoncer le clou un peu plus profond. Je me trouve immobilisée à côté d'une dame qui se plaint de la chaleur. La même qui demain se plaindra de la pluie, j'imagine. Comme je dois commencer mon journal pour Libération, j'écoute les conversations plus attentivement que d'habitude et perçois l'intensité du rien un cran plus fort. Je m'en veux de ne savoir apprécier ces petits moments où tout s'arrête. Pourquoi ne suis-je pas capable de parler de la chaleur en toute décontraction, de l'orage qui va arriver, des saisons qui ne se font plus ? Pourquoi suis-je toute raide dans mon fauteuil alors que la patronne se plaint de son apprentie, avec la bénédiction des clientes ? Oui, vraiment, Malika est une sale gamine. Elle a cassé un miroir la veille en nettoyant le salon. Un coup de balai en plein dans le mille. La patronne rend service en prenant des apprentis - c'est ce qu'elle dit - et c'est tout le remerciement qu'elle en a. Tout le monde approuve, olé ! S'ensuit le couplet sur les jeunes qui ne respectent rien, qui pensent que ça va tomber tout cuit. Discussion de comptoir un matin en France, mépris ordinaire, complicité vulgaire. Pour faire écran entre la haine et moi, je sors de