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Libération

«Salve papa, salve Nicole»

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par Wladimir KAMINER
publié le 10 novembre 2007 à 1h25

Ma fille Nicole a changé d'établissement scolaire. Au lieu de perdre une cinquième année de sa vie à l'école primaire, elle est passée au lycée, et pas à je ne sais quel lycée Papillon, mais au lycée classique, où l'accent est mis sur le latin. Nous mettions de grands espoirs dans cet accent-là. A l'école primaire, les gosses avaient passé quatre ans à se masser le dos. Nicole avait sans arrêt des journées consacrées à quelque projet pédagogique. Au lieu d'avoir classe, les enfants jouaient à des jeux de société, ils découpaient quantités de papier, confectionnaient des petits oiseaux, allaient chanter des berceuses aux mémés des maisons de retraite et fréquentaient régulièrement l'atelier poterie.

Ces quatre années d'enseignement nous ont valu une bonne vingtaine de cendriers biscornus en terre cuite, faits par Nicole en personne, et qui encombrent les étagères - pour nous rappeler que l'école, en Allemagne, n'est pas faite pour acquérir un savoir, mais qu'elle est une institution sociale apprenant aux enfants à se débrouiller dans un groupe formé d'individus divers. Rien à dire contre ça, il est naturellement plus simple d'apprendre à lire et à écrire qu'à résoudre des conflits. J'attendais néanmoins d'un lycée qu'il apporte un peu plus de culture et protège contre le raz-de-marée de l'abrutissement précoce. En outre, je voulais apprendre le latin en même temps que ma fille, et je n'étais nullement gêné par le fort accent saxon du prof de latin.

«Vivre ensemble». Nicole abor