Une vague de victimisation et d'hypocrisie submerge l'Italie. Pour esquiver leurs responsabilités, les puissants n'ont plus recours à la philosophie de Machiavel, mais aux larmoiements des feuilletons télé. Tous se déclarent injustement accusés, persécutés et censurés. Mais ils restent en liberté, ne quittent pas leur fauteuil et parlent à tort et à travers, dans tous les journaux et sur tous les écrans de télé. Le président de la région Sicile, Totò Cuffaro, démocrate-chrétien de l'UDC, est condamné à cinq ans de prison pour délit de concussion et favoritisme. Il réplique illico : «Je suis une victime, on me persécute, le favoritisme est un délit sans gravité.» Comme si l'on disait : «Je suis un voleur, mais je pourrais faire bien pire.» Il reste donc en place, même s'il est frappé d'interdit par l'administration.
Rats. Naples est noyé sous les ordures. On attend que quelqu'un prenne ses responsabilités, du côté des politiques qui, pendant des années, ont toléré que dans ce secteur la camorra dicte sa loi, avec ses décharges illicites. Mais personne ne démissionne. Le président de la région, Bassolino, de centre gauche, confie : «Je suis victime d'une escalade incontrôlable.» Le maire Rosa Jervolino déclare : «Je l'avais dit, je suis une victime que personne n'a écoutée.» Les anciens administrateurs, de droite, disent : «Autrefois j'étais au pouvoir, mais ça, ce sont de nouvelles ordures.» La RAI les reçoit dans le cadre de plusieurs débats