Menu
Libération

Saban Bajramovic, temps des adieux

Article réservé aux abonnés
publié le 14 juin 2008 à 3h53

«Où est Saban ?» (prononcer«shabane») Cette phrase a été repétée des millions de fois par ses fans, les promoteurs de concerts et les producteurs de disques qui ont eu affaire à lui. Saban Bajramovic, surnommé «le roi des Gitans de Serbie», était rarement là où on le cherchait. Mais sa Mercedes blanche pouvait apparaître par surprise lors d'un mariage rom à Vienne ou dans un restaurant yougoslave à Düsseldorf.

Né en 1936 à Nis, dans le sud de la Serbie, Saban échappe au génocide des Roms par les nazis, qui emporte ses parents. Cireur de chaussures, il chante dans les tavernes. Son premier 45 tours sort en 1964 et la chanson Pelno Me Sam («Je suis en prison») le propulse vers le succès. C'est son Jailhouse Rock à lui, mais à la différence d'Elvis, il raconte ce qu'il a vécu : cinq ans de cachot sur l'île de Goli Otok pour désertion pendant son service militaire et insoumission.

Avec ses bras tatoués, souvenir de prison, et ses dents en or, c'est un fauve en liberté, un Vince Taylor des mahalas (les ghettos roms des Balkans) et sa légende se nourrit d'une litanie de frasques : bolides emplafonnés, hôtels saccagés, orgies à la rakija (eau-de-vie). Mais tout cela ne serait rien sans le magnétisme de sa voix, ses intonations soul, ses chansons qui exaltent la marginalité.

Quand son caractère ingérable finit par le couper du milieu musical, il se consacre au circuit très rémunérateur des mariages. L'utilisation de ses chansons dans les films